Aimé chez nos voisins du Sud, USA

Parution et recension de : Le crime de sœur Marie-Hosanna, dans la French Review (mars2020). Une parution d’enseignants à Charlotte, en Caroline du Nord.

Michèle Bissière, PhD Professor of French

Managing Editor, The French Review

 THE FRENCH REVIEW, Vol. 93, No. 3, March 2020 Printed in U.S.A. 

Creative Works 

edited by Khadija Khalifé

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Bergeron, Claire. Le crime de soeur Marie-Hosanna. Druide, 2019. ISBN 978-2-89711-463-3. Pp. 464. 

Bon sang, quel crime a donc pu commettre cette adolescente de quinze ans pour être condamnée en 1910 à mener une vie cloîtrée au monastère des Augustines de la Miséricorde de Jésus à Québec? Dans la scène qui ouvre ce roman, les paroles et les gestes du père de la jeune criminelle, aussi bien que les paroles et l’immobilité de la supérieure du cloître, en disent long sur le Québec à l’époque. La société d’alors est dominée par l’emprise absolue de l’homme—qu’il soit mari, père de famille, curé, évêque ou Saint-Père. Le père de la criminelle est l’éminent juge Martel en personne, lui qui est craint tant par ceux qui comparaissent devant lui que par ses collègues. Dans cette première scène, le père se révèle envahissant, autoritaire, voire tyrannique, égocentrique, intolérant, intransigeant, impitoyable, en somme une brute de la pire espèce. Or soeur Marie des Saints-Anges, la supérieure du monastère, ne se laisse pas intimider. Au contraire, elle demeure à tout moment maîtresse de la situation, témoignant de la compassion et de la compréhension à l’adresse de la jeune accusée et souhaitant à celle-ci de trouver sérénité et paix au monastère. Sans une parole de plus le père met fin à la scène et retourne à sa voiture dans la cour tandis qu’Ophélie essuie ses larmes et se dit: “Cet homme est mon père, et pourtant, il demeure un étranger à ma vie. Jamais je n’ai senti chez lui la moindre parcelle d’amour à mon égard” (16). Lui, en fait, sort désormais à jamais “de son existence, sans un regard en arrière. […] La pauvre enfant posa son front contre la vitre froide, petite ombre esseulée derrière le large châssis du cloître des Augustines, qui devenait, à partir d’aujourd’hui, sa prison à perpétuité” (16). Comment une jeune Canadienne française de l’époque peut-elle se libérer de la prison patriarcale et religieuse qui la retient? D’abord en se résignant à son sort de femme: en devenant l’épouse du Christ, en changeant son nom d’Ophélie Martel dite Ophélie Langelier à soeur Marie-Hosanna, et en soignant les malades en tant qu’infirmière à l’Hôtel-Dieu des Augustines. Puis en fuyant le monastère à vingt-deux ans et en s’ouvrant au hasard des circonstances, ce qu’elle fait avec Margot, une de ses patientes. Margot est une ex-prostituée montréalaise, d’orientation homo sexuelle, attirée par Ophélie. Elle mène celle-ci à travers maintes aventures parfois rocambolesques qui aboutiront en Abitibi où Ophélie pourra enfin créer pour elle la vie personnelle, familiale et professionnelle qui correspond à qui elle est. Grâce à une élégance et une fluidité d’expression, ce roman d’aventures et d’initiation se navigue en douceur. 

Independent ScholarJ. Vincent H. Morrissette 

2 Comments

  1. Un livre qui nous transporte dans une autre vie ! Bravo Mme Bergeron
    Je suis impatiente d’en lire un autre !

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